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Des emplois qui ont de la ressource

Donner une seconde vie aux objets… fauteuils, meubles, jouets, livres… en créant des emplois, tel est le credo de Résistes (Ressourcerie Entrepreneuriale Seinomarine d’Insertion Sociale par le Travail et l’Engagement Solidaire), créée en juin 2014, dans l’agglomération rouennaise. Sa directrice, Sophie Courtois, fait le point après un an d’existence, avec la fédération des entreprises d’insertion Normandie qui l’a accompagnée sur ce projet.

Pouvez-vous nous rappeler l’activité de RESISTES ?

RESISTES est une ressourcerie, conventionnée entreprise d’insertion, sous statut associatif. Notre projet repose sur plusieurs dimensions. Environnementale d’abord : notre activité est de favoriser la réduction des déchets en apportant une alternative à l’enfouissement et à l’incinération. Economique ensuite : notre activité s’appuie sur une économie circulaire et collaborative, créatrice d’emplois. Sociale également : notre activité privilégie les personnes et le travail au capital et à la répartition des bénéfices ; RESISTES salarie 9 personnes dont 4 en parcours d’insertion. Solidaire enfin : notre activité développe une offre de biens et services à bas coûts. Elle favorise également les actions, porteuses de lien social, de médiation et de coopération.

RESISTES assoie son modèle économique sur ses ventes, en boutique et lors d’évènements, ainsi que sur des prestations de débarras, comme vider une maison par exemple. Ces 5 derniers mois, les ventes représentent près de 60 K€ de recettes. Nous proposons également des prestations ayant pour but de sensibiliser et d’éduquer à la protection de l’environnement, dans un souci de « faire ensemble ».

Quel est l’intérêt pour une collectivité d’appuyer le développement d’une ressourcerie sur son territoire ?

La ressourcerie offre un service d’intérêt général. Il est essentiel pour les collectivités de se doter d’outils et d’un certain niveau de professionnalisme pour assoir leur compétence en gestion des déchets. La ressourcerie fait l’objet de certaines règles en matière de suivi et de traçabilité : plateforme de pesée, suivi des différentes collectes… entre ce que nous apporte les gens, les collectes à domicile et celles réalisées dans le cadre de la REP-DEA (Responsabilité Elargie des Producteurs dans les Déchets d’Eléments d’Ameublement) dans sept déchèteries de la Métropole Rouen Normandie – rive sud.

RESISTES intervient sur 35 communes. Nous avons collecté, ces 5 derniers mois, près de 60 tonnes de matériaux dont 25 tonnes ont déjà été revendus, depuis l’ouverture de nos locaux à Darnétal dans la zone d’activité de Waddington. Concernant nos différentes collectes, près de 15 tonnes proviennent d’apports volontaires ce qui au départ nous a surpris… nous sommes énormément sollicités et le projet a suscité l’adhésion de nombreux citoyens du territoire. Les personnes sont sensibles à la réutilisation et au réemploi pour limiter les déchets ultimes !

Existe-t-il des différences entre une ressourcerie et une recyclerie ?

Ressourcerie est une marque déposée par le réseau national des ressourceries qui garantit une démarche de progrès, une action de développement durable et de projet environnemental à travers l’application d’une charte. Près de 140 ressourceries existent en France. Une ressourcerie a obligatoirement 4 fonctions : récupérer (collecter en vue de la réutilisation voire du réemploi ou du recyclage en phase), réutiliser (suite aux collectes, tri, nettoyage, réparation et valorisation), revendre et sensibiliser.

Une recyclerie ne porte pas forcément ces 4 missions, en particulier celle portant sur la sensibilisation et l’éducation à la protection de l’environnement, comme par exemple des actions dans des collèges auprès de jeunes publics.

Comment vous est venue l’idée de créer RESISTES ?

Je suis tombée dedans toute petite ! A 18 ans, j’organisais déjà une foire au troc dans la ville de Grasse. Cela participe à une approche de consommation responsable ! Et puis au fil de mon expérience et des opportunités, l’idée a fait son chemin.

Au cours de mon précédent poste à l’Aspic (Association stéphanaise de prévention individuelle et collective), j’ai monté des ateliers autour du réemploi et de la réutilisation : des ateliers bois, bijoux et art-récup’ dans l’idée de revendre ces productions pour financer des départs en vacances. En 2009, une grande surface nous permet de capter 60 m3 de meubles de bazar divers et vêtements neufs. Les premières ventes s’organisent pour écouler cette masse captée. L’idée de RESISTES germe dans mon esprit. Une visite de la Maison d’Economie Solidaire à La Chapelle Aux Pots finit de me convaincre. Je commence à me former pour créer une ressourcerie et passe une licence de « coordinatrice de projet collectif en insertion sociale et professionnelle » pour développer mes compétences. Le 18 juin 2014 signe l’assemblée constitutive de RESISTES. 

Comment êtes-vous passée de l’idée à la création de votre entreprise ?

J’ai été bien entourée ! D’abord par l’ADRESS qui en 2010 me soutient pour réfléchir à un projet de Ressourcerie sur la partie étude d’opportunité. J’ai ensuite bénéficié de 12 jours d’accompagnement du réseau national des ressourceries sur le  merchandising, la sécurité, la gouvernance, la démarche qualité, etc. dans le cadre d’un agrément post-étude co-financé par l’ADEME. J’ai également présenté mon dossier à Eco-Région Solidaire pour mener une étude de faisabilité avec des financements région de 2013 à 2014.

Dès le départ,  je voulais aussi que la ressourcerie soit une entreprise d’insertion, dans l’idée de contribuer à accompagner vers un emploi durable des personnes en difficulté et de pérenniser des emplois. La fédération des entreprises d’insertion Normandie m’a accompagné sur ce volet en participant dès 2013 au Comité de pilotage en me donnant ses conseils quant à la mise en œuvre d’un projet qui participe à l’insertion professionnelle par un modèle économique stable et durable. Elle m’a également appuyé dans le conventionnement entreprise d’insertion de RESISTES et m’apporte encore aujourd’hui son expertise dans le développement de mon activité économique et dans toutes les problématiques liées à la formation et l’accompagnement des personnes en parcours d’insertion.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à celles et ceux qui, comme vous, souhaiteraient se lancer dans la création d’une entreprise d’insertion ?

Avoir l’envie et motivation, se doter d’énormément d’outils accompagnement et savoir s’entourer de personnes compétentes pour co-construire et rompre l’isolement du créateur d’entreprise. Elaborer  aussi un portefeuille de compétences et de personnes ressources pour chercher de la complémentarité et du savoir faire.

Porter un projet est très chronophage, la motivation est mise à rude épreuve. La charge de travail est énorme en phase de démarrage. On n’est pas à 35 heures par semaine ! Cela nécessite un engagement militant et des ressources managériales indéniables.

Le fait d’être une femme est-il pour vous plutôt un atout ou un obstacle pour diriger une entreprise d’insertion ?

Etre une femme n’est pas facile dans l’univers du déchet et de l’insertion professionnelle ! Les rapports avec les salariés en insertion peuvent en être influencés. J’ai été parfois confrontée à des remarques misogynes de la part de salariés… Il faut dire qu’il y a très peu de femmes dans la gestion et de la prévention des déchets et d’autant plus dans les entreprises d’insertion ! Je suis aussi régulièrement confrontée à l’étonnement des partenaires que je rencontre. Mais cela disparait lorsque les termes techniques sont abordés et que les preuves sont faites de mon professionnalisme.

Quelles sont vos perspectives maintenant ?

Mon objectif est désormais de consolider notre modèle et de prouver notre plus-value environnementale, sociale… en termes de qualité et de compétences également. Nous avons aussi pour projet d’agrandir nos locaux actuels en passant de 850m² à 1250m². Nous travaillons également au développement d’un partenariat avec l’université de Rouen pour permettre à des étudiants de se meubler. Nous réfléchissons enfin à l’essaimage de RESISTES avec des boutiques éphémères.

Reportage de RESISTES au JT de France 3 Haute-Normandie – février 2016

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Crédits photos : © RESISTES

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